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Le taux de prévalence du diabète ne cesse d’augmenter ces dernières années : il touchait 1,6 million de personnes en 2000 pour 4,1 millions de personnes en 2017. Et cela n’est que le reflet national d’une croissance mondiale estimée à 622 millions de personnes en 2040 (Yau JW et al. Meta-analysis for eye-disease (META-EYE) study group. Diabetes care 2012). Mais revenons dans l’Hexagone où malheureusement, tous les diabétiques, et particulièrement les patients âgés, isolés, en manque de mobilité et résidant dans des territoires ruraux, ne bénéficient pas d’un suivi ophtalmologique annuel tel que recommandé par l'HAS, par manque d'ophtalmologistes et d'orthoptistes.




En effet, si dans le cadre de cette maladie chronique, la bonne gestion de la glycémie et de l’alimentation sont primordiales, une autre pathologie importante en découle : la rétinopathie diabétique (abréviation RD). Quid ? Il s’agit d’une diminution de l'acuité visuelle pouvant conduire rapidement à une totale cécité (1ère cause de cécité chez les sujets de moins de 60 ans). Pour les RD proliférantes, deux semaines suffisent à réduire considérablement l’état de la vue. Autre élément à charge, après 20 ans d'évolution du diabète, plus de 75 % des diabétiques ont une RD. De plus, son taux de dépistage chez les diabétiques est inférieur à 50 % et la prise en charge est souvent bien trop tardive étant donné qu’il faut entre 6 et 14 mois pour obtenir un rendez-vous avec un ophtalmologiste en zone rurale, sans compter les problèmes de transport des patients ou leurs comorbidités.



Maintenant que le problème est posé, quelle solution envisager ?

La plus simple est d’effectuer une rétinographie annuelle. Avec un diagnostic précoce, la RD peut être traitée efficacement. Le dépistage peut s’organiser via une consultation directe chez l’ophtalmologiste ou encore par le biais de télémédecine par transfert de rétinographie couleur (photographie couleur du fond d’oeil rétinien) d’un service d’endocrinologie vers un service d’ophtalmologie, ou par une rétinographie réalisée par un orthoptiste et adressé à un ophtalmologiste. Cependant, en dehors des campagnes mobiles des réseaux, aucun de ces professionnels n’est apte à se déplacer directement chez le patient pour des soins courants.

Depuis une dizaine d’années, des réseaux de dépistage de la RD se sont organisés (réseau de santé CAREDIAB en Champagne Ardenne, réseau OPHDIAT en Ile-de-France, réseau RESOLADI en Picardie), mais les initiatives restent insuffisantes et les patients diabétiques toujours examinés trop tardivement.


Imaginons un protocole permettant de déléguer la prise de la rétinographie couleur à une infirmière diplômée d’état, qui lors de ses tournées (y compris dans des déserts numériques et médicaux) et de ses soins, réalise les clichés adressés ensuite pour lecture et conduite à tenir en ophtalmologie. En effet, la rétinographie non mydriatique est un acte indolore non iatrogène qui ne nécessite aucune préparation ou intervention, ni aucune dilatation de l'œil. La seule formation nécessaire repose sur l’utilisation d’un rétinographe portatif. En cas d’absence d’un ophtalmologiste local, l’IDEL peut s’appuyer sur une plateforme d’appui spécialisée pour l’interprétation des rétinographies (télé-expertise).

Enfin, dans le cas d’une rétinographie anormale ou d’une situation diagnostiquée comme urgente, l’IDEL organise rapidement le transfert du patient vers une unité de soins ophtalmologiques tout en rassemblant les données collectées dans le Dossier Médical Partagé de son patient.


S’appuyer sur un réseau d’IDEL permettrait d’avoir accès directement aux patients les plus fragiles résidant dans des déserts médicaux.

S’appuyer sur un réseau d’IDE permettrait également de dépister en large volume, en incluant également le dépistage de la DMLA (Dégénérescence maculaire liée à l’âge) réalisé aussi à partir de rétinographie couleur.

L’ophtalmologie étant une spécialité en accès direct, l'accompagnement du patient par l'infirmière pour une téléconsultation avec un spécialiste est un acte reconnu et rémunéré 15€ quand il est réalisé depuis le domicile du patient (Avenant N°6 du 1er janvier 2020). Quant au spécialiste, il est rémunéré comme en présentiel selon le barème CPAM.

La mise en place de ce parcours pluriprofessionnel participerait à la réduction de la cécité liée à la DMLA et à la RD et donc en parallèle, à réduire les coûts de la dépendance qui en résultent.


Enfin, si pour réaliser cette procédure ophtalmo vous vous posez la question du “comment téléconsulter depuis un désert numérique ?”, je vous invite à parcourir les articles postés sur “Infirmières 3.0 : le Blog” afin de découvrir le Medibag, ce sac à dos connecté capable de re-créer un réseau wifi dans les zones blanches du territoire.



Si l’expression “dispositif médical” appartenait uniquement aux univers industriels et médicaux jusqu’en 2020, elle a désormais intégré le langage courant du citoyen lambda. Et pour cause, ce dernier a découvert avec le confinement lié à la crise Covid, qu’il était possible de subir un examen para-clinique ailleurs qu’à l’hôpital ou chez un médecin, et d’en obtenir des résultats précis à valeur médicale équivalente.

Mieux, si la pandémie a largement ouvert la porte à une télémédecine qui peinait à se faire une place dans le sens commun depuis 20 ans, en une année, ce n’est plus un pas, mais une galaxie entière qui a été sautée. 15 mois après le 1er confinement, on attend même du “patient 2021” qu’il s’auto-diagnostique sous la supervision d’un médecin distant en utilisant des dispositifs médicaux mis à sa disposition dans des pharmacies ou des supermarchés. La télémédecine a donc de beaux jours devant elle, et c’est heureux étant donné la pénurie de médecins que nous traverserons encore durant les quinze prochaines années.



Mais revenons-en à nos dispositifs médicaux par lesquels on entend « tout instrument, appareil, équipement, matière, produit, accessoire ou logiciel” conçu à des fins médicales et dont la fonction est d’assister les moyens pharmacologiques, immunologiques ou métaboliques mis en œuvre pour préserver la santé. Ces dispositifs médicaux (que nous appellerons “DM”) sont classés de 1 à 4, et peuvent être, par exemple, des lunettes correctrices, des saturomètres/tensiomètres/oxymètres/thermomètres/glucomètres, des appareils d’échographie ou de dermatologie, etc.


L’accélération de la télémédecine s’est caractérisée par l’évolution de ces DM qui sont devenus des objets connectés.

L’accélération de la télémédecine s’est caractérisée par l’évolution de ces DM qui sont devenus des objets connectés. De nombreuses startups et autres grands groupes se sont notamment lancés dans la course au développement de DM connectés afin d’entrer sur de nouveaux “marchés”, parmi lesquels celui des professionnels de santé exerçant loin des grandes villes ou encore des patients résidant trop loin d’une agglomération pour prétendre à un suivi médical régulier.




En effet, dans le cadre d’une immobilité passagère ou permanente, du suivi d’une pathologie chronique, ou d’un isolement lié à l’âge, la télémédecine spécialiste s’invite plus aisément au chevet du patient pour collecter, via ces appareils, toute sorte de données médicales permettant d’éviter les complications, les hospitalisations et transports inutiles aux urgences. Mieux traités tout en restant à proximité de leur lieu de vie, les patients bénéficient alors d’une prise en charge plus rapide, fondée sur le rétablissement du lien ville / hôpital, et donc d’une véritable amélioration de leur parcours de soins.



Les tablettes et autres appareils de monitoring connectés ne peuvent fonctionner sans réseau disponible.

Et pourtant, depuis le début de votre lecture, vous entendez un “mais”.

Et vous avez raison.

Si tout ce que nous venons d’évoquer n’est que vérité et retours d’expériences terrains, une question reste inévitable : “Si ces DM dits connectés le sont véritablement, à quoi se connectent-ils dans les zones peu ou pas couvertes par les réseaux de communication et les opérateurs de téléphonie ?” Si soulever cette question peut sembler simpliste, cela n’en reste pas moins d’une évidente logique. Les tablettes et autres appareils de monitoring connectés ne peuvent fonctionner sans réseau disponible. À tel point que la plupart des constructeurs et développeurs, qui communiquent pourtant sur l’aspect connecté de leur(s) solution(s), le stipulent en toutes lettres dans leurs conditions générales d’utilisation. Nombreux sont donc les établissements de soins, les Maisons de Santé, les véhicules sanitaires et autres cabinets privés qui se sont dotés d’objets connectés qu’ils ne peuvent malheureusement pas utiliser sans dépenser également (et parfois sans succès au bout du compte) dans une couverture numérique du lieu concerné. Ce qui éloigne donc toute possibilité de se rendre au domicile du patient, impliquant donc de le faire déplacer pour le traiter.


À bien y réfléchir, l’idéal serait donc de pouvoir combiner la précision médicale des examens (qui n’est pas à remettre en cause) fournis par ces DM connectés, à une solution de transmission sécurisée performante depuis les zones grises et blanches du territoire.

C’est un sujet sur lequel nous avons tout particulièrement travaillé depuis 2015 au sein d’Alrena Technologies. Nous nous sommes rendus au cœur des départements de la Creuse, de la Dordogne, de l’Occitanie, du Cantal ou de la Normandie, et partout où nous sommes passés, nous avons prouvé que créer de la bande passante, et donc permettre la téléconsultation généraliste ou spécialiste via des DM connectés, relevait désormais du possible pour les déserts numériques.



Bien qu’elle existe depuis septembre 2018, la téléconsultation doit son essor à la pandémie de Covid19 débutée en 2020. Accessible via des cabines de téléconsultations installées dans des pharmacies, des mairies ou des supermarchés, elle a permis à une partie de la population résidant dans des déserts médicaux d’accéder à des soins de santé de qualité. Ceux qui les ont utilisées ont rapporté l’extraordinaire technologie mise en oeuvre à l’intérieur pour faciliter les check-up médicaux fondamentaux (prise de tension, de température, poids, …), ainsi que le confort offert à l’usager qui s’installe sur un siège adapté et échange de vive voix au travers d’un écran plat avec le médecin disponible immédiatement pour le recevoir.


Résidant dans des zones qualifiées de « désert numérique», l’expérience digitale de cette population se caractérise par une connexion instable aux réseaux de téléphonie et un accès à internet limité.

Toutefois, comme le souligne le Vademecum de la télémédecine, qui dit téléconsultation implique garantie d’une communication orale et vidéo fluide entre le patient et son médecin. Et pour que cette fluidité soit possible, il faut bénéficier d'une (très) bonne couverture réseau.

En France, 60 % du territoire, soit 23 millions de ruraux, restent à couvrir en réseau à (très) haut débit. Résidant dans des zones qualifiées de « désert numérique » ou « zone blanche », l’expérience numérique de cette population se caractérise par une connexion instable aux réseaux de téléphonie et un accès à internet limité, voire inexistant. Par définition, si les cabines de téléconsultations répondent à la problématique posée par les déserts médicaux, elles ne constituent toutefois pas une réponse adaptée pour ces 23 millions de personnes.


Ces cabines permettent à la médecine d’aller à la rencontre de chaque patient et leur concept même repose sur un principe simple, celui de couper la poire en deux. A défaut de poire, c’est la distance et les déplacements des patients qui sont ici réduits, parfois même de 90%. Plus besoin de se rendre dans la grande ville de proximité, un médecin vient à la rencontre de chacun, dans sa commune ou son village.

Mais réduire la distance entre un patient et le système de santé reste encore insuffisant pour une autre tranche de cette même population rurale composée de ceux et celles souffrant d’une perte d’autonomie passagère ou permanente ou d’un isolement lié au grand âge. Pour ceux-là s’ajoutent la contrainte incontournable du dernier kilomètre à parcourir pour se rendre dans une cabine … qu’ils ne sauront ni ne voudront utiliser car ils ne sont pas technophiles.


André Accary, Président du département de Saône-et-Loire, est par exemple très sceptique sur les cabines de téléconsultations installées dans les mairies. «Pour avoir un diagnostic précis, il faut bien que de chaque côté vous ayez un professionnel de la santé averti». Même inquiétude de la part du Maire de Varzy, M. Gilles Noël : «Ça ne sert à rien d’avoir un EHPAD équipé d’un dispositif de télémédecine pour contacter le CHU s’il n’y a personne au bout du fil”.


La téléconsultation est un outil prodigieux pour lutter contre les déserts médicaux… mais elle ne doit être qu’un élément de la chaîne de solidarité médicale.

Quatre freins se distinguent donc quant à l’utilisation des cabines de téléconsultations :

  1. Il faut qu’elles soient installées dans des endroits très bien couverts par les opérateurs classiques;

  2. Elles ne s’adressent qu’à une population technophile

  3. … capable de se déplacer pour s’y rendre

  4. et également capable d’appréhender l’usage de dispositifs médicaux.


Un 5ème frein fait peu à peu son apparition : celui de la réticence des médecins quant à leur utilisation. Le mois dernier (Avril 2021), le Conseil national de l’Ordre des médecins s’insurgeait fermement contre la mise en place de cabines de téléconsultations dans des Monoprix, au titre qu’une téléconsultation doit être inscrite dans le parcours de soins coordonnés, et qu’un médecin ne peut prendre en charge un patient sans possibilité de procéder à un examen clinique, sans avoir connaissance du tissu sanitaire médico-social, et sans apporter une garantie que la continuité des soins pourra être assurée.


Si les cabines de téléconsultations constituent donc aujourd’hui un début de réponse à la problématique des déserts médicaux, l’application de la télémédecine pour tous et partout reste en cours de réflexion. Dans l’idéal, la solution la plus adaptée aux besoins de l’ensemble de la population française, urbaine comme rurale, devrait pouvoir cocher toutes les cases :

  • réseau en toute circonstance,

  • mobilité pour se rendre au chevet du patient,

  • sécurité des données,

  • accompagnement humain,

  • et sécurité du parcours de soins du patient.


Et si cette solution existait déjà… ?


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